
Le réchauffement climatique et les changements de températures extrêmes sont en constante augmentation dans le monde avec des vagues de canicule, des inondations, et des ouragans sans précédent. Le Moyen-Orient paye un lourd tribut du changement climatique avec des pics de chaleur atteignant parfois les 50 degrés. Dans la décennie à venir, ces températures pourraient même devenir la norme durant les mois d’été. Ainsi, le phénomène désertique est devenu ces dernières années un défi mondial majeur. Les déserts couvrent plus de 40 % de la surface mondiale et abritent déjà aujourd'hui plus de 20 % de la population mondiale. D'ici 2025, 1,8 milliard de personnes connaîtront un "manque total d'eau" et les conséquences dévastatrices du phénomène désertique se manifesteront par les dommages causés à la diversité biologique, à la stabilité socio-économique et au développement durable. Pour faire face aux défis posés par le climat, l’initiative israélienne DeserTech a été créée il y a 4 ans et demi par la Fondation Merage Israël, l'Institut d'innovation israélien, le ministère de la Protection de l'environnement et l'Université Ben Gurion du Néguev. Elle promeut le développement, l'adaptation et la commercialisation de technologies permettant la durabilité dans les zones arides, tout en transformant la région du Néguev en un pôle entrepreneurial mondial pour ces technologies.
"L’objectif est de développer l’économie dans le Néguev grâce à des solutions technologiques israéliennes qui peuvent également s’appliquer aux régions du monde touchées par des climats extrêmes dans le désert, le manque d'eau et le phénomène des terres arides qui rendent l’agriculture impossible. Nous aidons également les startups israéliennes à se développer dans le Néguev", explique Sivan Cohen Shachari, responsable du pôle entrepreneurial chez DeserTech.

Des alliances pour faire évoluer les technologies
En s’appuyant sur la recherche technologique existante, issue de l'Université Ben Gurion et ses Instituts de recherche sur le désert, des centres régionaux de R&D et des principales entreprises dans les domaines de l'agriculture durable, de l'énergie, de l'eau et des infrastructures, DeserTech fait le pont avec des startups du monde entier. Ces entreprises, situées en Angleterre ou en Hollande par exemple, n’ont pas de désert dans leur pays mais souhaitent développer leur technologie dans des régions désertiques. DeserTech les aide à constituer des projets pilotes dans le Néguev afin que leur technologie soit utilisée en Israël. Cela permet d’augmenter les revenus des agriculteurs du Néguev qui travaillent ainsi en coopération avec des startups étrangères.
DeserTech accompagne aussi les organisations privées et publiques dans la mise en œuvre de l'innovation au travers d’événements pour créer des liens, d’un forum pour les PDG et de programmes de mentorat mais aussi de conférences et de séminaires internationaux pour le développement et l'adaptation de technologies répondant aux défis du désert.
"Nous créons des partenariats avec des startups, des investisseurs, des organisations internationales et des chercheurs et nous leur trouvons le projet le plus compatible avec leurs attentes", déclare Sivan.
DeserTech a notamment mis au point un projet avec la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification dans les pays d’Afrique du Sahara. Une délégation africaine du Nigéria a ainsi été invitée en Israël en mars 2023, pendant une semaine.
"C’était un processus compliqué car Israël n’a pas de relations diplomatiques avec les pays d’Afrique, mais c’était un challenge intéressant. Ils ont constaté comment nous faisons face aux conditions désertiques, et ont pris note des solutions qu’ils peuvent exporter. Une vingtaine de projets ont été conceptualisés après avec un représentant d'Afrique et un représentant d'Israël. Nous les avons aidés à se connecter à des fonds d’investissement pour que nos solutions puissent être appliquées et promues en Afrique", affirme Sivan.

Il y a environ 9 mois, DeserTech a monté un centre d’innovation accélérateur de startups pour développer de nouvelles technologies et aider les entreprises à prospérer sur le marché. Le centre d'innovation a été fondé après avoir remporté l'appel d'offres de l'Autorité israélienne de l'innovation et de quelques ministères pour établir des centres d'innovation dans la périphérie d'Israël.
"Aujourd’hui, nous connaissons la température moyenne du Néguev, mais dans dix ans, nous savons que le climat sera différent. Il faut se soucier dès maintenant de ce problème afin d’ajuster les technologies aux températures extrêmes, avec du matériel résistant et des constructions favorables au soleil", déclare Sivan.
DeserTech se focalise essentiellement sur le Moyen-Orient car c’est une zone sensible qui va subir des changements climatiques importants, mais aussi sur les pays d’Europe tels que la France, le Portugal, l’Espagne, l’Italie, Chypre et la Grèce où les effets du réchauffement climatique se font déjà ressentir.
"Ce que nous vivons en Israël depuis des années avec peu de jours de pluie par an ou des précipitations sur peu de temps, des canicules et des incendies s’observent aujourd’hui en Europe. L’Afrique et le pourtour méditerranéen sont aussi des régions sur lesquelles nous mettons l’accent pour exporter nos technologies", affirme Sivan.
Selon elle, Israël est un leader important sur la scène internationale en termes d’innovations contre le réchauffement climatique, notamment en raison du caractère pragmatique des Israéliens.
"Nous pensons vite et nous effectuons les tâches rapidement. Nous sommes très efficaces car on fuit une réalité de guerre difficile, mais aussi surtout parce qu’on est un 'pays île', entouré de voisins hostiles : on doit se soucier de notre propre développement. Nous ne pouvons pas vraiment compter sur les autres, donc nous devons tout créer nous-mêmes; cependant, sans coopération avec l'étranger, on ne pourra pas avancer correctement. Il faut multiplier les partenariats, c’est ce qui nous fait croître", a conclu Sivan.
Caroline Haiat
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